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A quoi bon être intelligents, si c’est pour détruire la vie ?

Cet article est un extrait de Passion d'Apprendre Magazine (vous pouvez le télécharger intégralement et gratuitement sur ce lien : https://passiondapprendre.com/Passion_d_Apprendre/m-Magazine-magazine )
A quoi bon être intelligents, si c’est pour détruire la vie ?
La rédaction m’avait gentiment proposé de rédiger un texte répondant au titre « vivre dans la paix et en accord avec notre environnement pour être heureux ». Jolie pensée qui, fut un temps, m’aurait séduit… mais me semble à présent totalement anachronique, tant la question n’est plus aujourd’hui d’être heureux, mais de sauvegarder la Vie. Celle des humains bien sûr (en tout cas dans des conditions décentes), mais pas que ! Car c’est l’ensemble du vivant qui est menacé sur terre ; pour preuve la sixième extinction massive des espèces, la première à être provoquée par l’humain, la première à le concerner directement.
La base-line du premier numéro de ce magazine affichait « utiliser intelligemment son cerveau ». Est-ce bien ce que fait l’humain depuis son arrivée sur cette planète ?
Lorsqu’il survécut au milieu des mammouths, découvrit le feu ou la roue, sans conteste. Lorsqu’il posa les bases de la démocratie en Grèce ou rédigea la déclaration des droits de l’homme, chapeau bas ! A l’inverse, les guerres de religion ou la shoah montrèrent comment la plus grande cruauté peut prendre le pas sur toute forme d’humanité. Et pourtant, ces derniers épisodes, aussi traumatisants soient-ils, ne sont rien, comparés au spectacle que nous déroulons depuis la deuxième moitié du XXè siècle : la destruction exponentiellement accélérée de la vie sur terre, sous le regard impuissant et éberlué des consciences de plus en plus nombreuses qui, heureusement, s’éveillent. 

Il est un point commun entre tous ces épisodes de l’humanité, heureux comme funestes : l’utilisation de notre cerveau, cet incroyable organe qui nous permet d’être devenus l’espèce dominante alors que nous sommes intrinsèquement une des plus faibles, comme vient de nous le rappeler, à point nommé, un petit virus de rien du tout.
Mais comment en sommes-nous donc arrivés là ?
En partie justement à cause de notre cerveau, qui a pris le pas sur le plus simple bon sens. Nous avons construit des systèmes d’une complexité folle, pour servir des motivations d’une futilité et d’une fatuité qui paraitraient inconcevables à quiconque les regarderait avec un minimum de recul. Nous avons spolié des mots comme « économie », devenue l’inverse de ce qu’elle désigne puisqu’elle organise le gaspillage du bien commun. Ou « croissance », qui au fond prépare l’effondrement de demain (et donc, de fait, la décroissance), en détruisant les ressources dont nous aurons besoin.
D’accord mais alors, pourquoi notre cerveau accepte-t-il de tels comportements, qui rendent possible notre autodestruction ? Parce que, de Newton ou Descartes (qui estimait que l’homme se devait d’être « comme maître et possesseur de la Nature ») aux théoriciens du progrès (dont il est généralement admis « qu’on ne peut pas l’arrêter »), cet organe est continuellement flatté dans sa soi-disant supériorité au sein du règne animal, dont il serait une sorte d’aboutissement ultime.
Or, ce même cerveau est peut-être aujourd’hui notre pire ennemi. En effet, selon le chercheur norvégien Per Espen Stoknes, le principal problème dans la lutte contre le changement climatique est justement d’ordre psychologique car « le réchauffement climatique, par les menaces qu’il projette sur notre avenir et par l’ampleur des mesures qu’il nécessite, crée de l’inconfort en remettant trop de choses en question dans notre existence. Et entre la connaissance du problème et la reconnaissance du besoin d’agir, notre réflexe est de refouler ces informations pour éviter d’y penser… Le cerveau favorise donc les comportements les plus automatiques et les plus rassurants possible afin de diminuer l’impact de ce stress ».
Alors, que faire ? Quelques pistes.
Nous pouvons justement décider d’« utiliser intelligemment notre cerveau » pour accepter de regarder la réalité en face, plutôt que de céder à la politique de l’autruche. Faire notre deuil de ce qui fut, et ne sera plus : une société basée sur le « toujours plus », le matérialisme et la consommation, l’espoir que les enfants seront plus riches que leurs parents, les voyages au bout du monde… Faire preuve d’humilité en acceptant que, si la vie de notre planète était ramenée à une journée de 24 heures, l’humain serait arrivé à… 23h58 ! Comprendre que nous n’avons pas à « défendre la nature », comme si elle était un élément extérieur à nous, mais que NOUS SOMMES LA NATURE, qui a besoin de se défendre pour perdurer.
Concrètement, nous pouvons tous refuser l’idée de supériorité de notre mental pour accepter que nous avons en réalité trois cerveaux - dans la tête, dans le corps et dans le cœur – afin de n’en négliger aucun et de les mettre en harmonie, lorsque nous prenons une décision. Ou encore, selon un autre éclairage, mettre en conformité les deux hémisphères de notre cerveau : le gauche  - celui qui décompose, analyse… et que notre société met à l’honneur – et le droit, qui s’intéresse au tout, innove, intuite. Et, à partir de là, nourrir les trois liens fondamentaux : à nous, à l’autre, à l’environnement.
Nous pouvons, sur le plan politique, donner uniquement nos voix à celles et ceux qui, à l’instar de ce que faisaient les Amérindiens, réfléchissent à l’impact sur plusieurs générations avant de prendre toute décision d’importance.
Ainsi, indépendamment de la situation extérieure concrète, nous placerons-nous sur un chemin favorable à notre bonheur, celui-ci étant en lien étroit et indivisible avec le sens et la cohérence qui se dégagent de nos actions. Avantage collatéral non négligeable, dans l’instant présent et à venir…
Et dire que je refusais de parler du bonheur ! 
photo fabien rodhain
Fabien Rodhain,
Auteur engagé pour la Transition Ecologique et Humaine, Fabien a écrit une quinzaine d'ouvrages dont la saga de BD "Les seigneurs de la Terre", la pièce de théâtre "Des semences et des hommes" ou encore le roman initiatique "L'homme qui ouvrit les yeux". 
Par ailleurs professionnel de l'intelligence collective, il a créé Codéveloppement Academy, qui forme et supervise des facilitateurs en codéveloppement.
«  l'optimisme de l'action, antidote au pessimisme du savoir.» 
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